Invitées en maison de repos pour explorer leurs troubles sexuels, trois jeunes femmes occupent les jours et les nuits à apprivoiser leurs démons intimes. Sous la supervision tranquille d’une thérapeute et d’un travailleur social bienveillants, le groupe tente de garder un équilibre fragile. Pour Geisha, Léonie et Eugénie, il s’agit, pour 26 jours, d’éviter les cris, d’apprivoiser les chuchotements du temps présent et de considérer l’avenir.
Tout à la fois critique et cinéaste, Denis Côté est un auteur aussi précoce que prolifique après avoir monté sa société de production dès l’âge de 21 ans. Son itinéraire sera riche et bien accompagné par Stéphanie Morissette, puis Sylvain Corbeil. Récompensé par un Léopard d’or à Locarno dès son premier long-métrage, Les états nordiques, il sera très tôt adoubé par la critique des deux côtés de l’Atlantique, notamment par les Cahiers du cinéma. Tourné dans un sublime noir et blanc, Elle veut le chaos installe une sorte de noman’s land ou plutôt de nowhere land québécois – mais surtout comme l’analyse Pierre-Alexandre Fradet, une « communauté de l’entre-deux » qui fera école chez d’autres cinéastes. il reçoit à juste titre le prix de la mise en scène à Locarno, suivi d’une rétrospective à la Cinémathèque québécoise.
Côté n’a jamais cessé d’alterner les formats et les supports et il est vite considéré comme un artiste à part entière (Carcasses, que l’auteur considère comme son œuvre la plus ouverte, Les lignes ennemies). C’est ensuite Curling qui achève d’en faire l’un des auteurs le plus en vue du cinéma mondial. Un film aussi énigmatique que pénétrant qui rénove le thème classique de l’hiver dans le cinéma québécois tout en travaillant le regard et la sensibilité du spectateur. Curling remporte à nouveau un double prix au festival de Locarno. la critique et les festivals s’enflamment…
Plus classique formellement, Vic + Flo ont vu un ours et son tandem d’actrices, reçoit néanmoins le prix de l’innovation à Berlin. Une fois encore, le récit surprend, laissant de longues plages d’interprétation au spectateur et maniant brillamment les ruptures de ton. Comme toujours, Denis Côté alterne avec des choses plus expérimentales, tournées sans moyens : le documentaire sonore Bestiaires ou l’essai Que ta joie demeure. Ses deux derniers films, la fiction Boris sans Béatrice avec entre autres Denis Lavant et le documentaire sur le culturisme Ta peau si lisse n’ont pas été distribués en France mais Denis Côté effectue son grand retour sur les écrans de l’hexagone avec le Répertoire des villes disparues. Si l’on suit de mouvement de balancier qui anime sa filmographie, on pourrait s’attendre à une « œuvre morte » par « amour du cinéma ».
Son travail n’en finit pas de susciter les questions et les études, élevant l’art cinématographique et l’ouvrant à une autre dimension où le personnel rejoint l’universel.
Les Percéides – Festival international de cinéma et d’art de Percé. Tous droits réservés